Tapette à mouches

Ceux d’entre vous qui ont lu "L’usage du monde" de Nicolas Bouvier, ont peut être en mémoire le passage aux accents rimbaldiens sur la mouche d’Asie ? À en croire l’auteur, cet animal parfaitement détestable suscite dès l’abord la haine la plus incandescente, transformant ainsi le voyageur occidental le mieux disposé en tueur assoiffé d’hécatombes. C’est la raison pour laquelle il me semble préférable de s’en tenir aux diptères plus policés de nos contrées, afin de les exterminer sans passion et sans acrimonie pour, si l’on peut dire, la simple beauté du geste. Mais, pour occire lesdits insectes dans le souci des règles du bon goût, encore faut-il posséder l’accessoire adéquat. Tous les diptérophobes auront naturellement reconnu sur la photo la fameuse tapette à deux coups de chez Gastinne Renette. Souple et légère, pourvue d’un très faible recul, cette arme de précision ne pourra que satisfaire le sportsman le plus exigeant. Afin de parfaire votre technique, je louerai autant qu’il se peut faire le passionnant livre de Wilbur Tippett "L’art de prendre la mouche", ouvrage de référence quasi introuvable car malheureusement jamais réédité depuis 1908.

Bonnes fêtes de fin d’année et bonne chasse à tous en 2017

FH

Cher Frédéric,

Je ne ressens point ton aversion pour les diptères, préférant, en bon juriste que je suis, leur faire subir tel autre traitement que tout mauvais esprit bien né devinera aisément.

J'en appelle cependant à ta science en matière de diptérophobie pour m'interroger, et t'interroger par la même occasion, sur le fait de savoir quel comportement  un végan de stricte observance doit adopter en pareille occurrence.

Je doute qu'il consente à exterminer le petit animal, ni même qu'il accepte d'utiliser le superbe accessoire dont tu portes l'existence à notre connaissance dans le somptueux daguerréotype ci dessus.

Comment pourra-t-il concillier sa phobie et sa superstition ridicule  son idéologie antispéciste ?

Bien à toi

J'ignorais que castorama avait racheté le célèbre brevet de la tapette à mouche avec tape en cuir, à Gastinne renette...
Ah!.. ces grands commerçants conquérants, rien ne les arrête.
Chez Gastinne renette, dernier fabricant de pistolet à duel, au temps béni ou les affronts pouvaient se régler entre soi, dans un bois et dans l'odeur de la poudre noire sans passer par l'omnipotence et l'incompétence des gens de loi et de juges grassement installés, comme aujourd'hui.
Chez gastinne, j'ai pu acheter, à la grande époque, les dernières cartouches en carton huilé de couleur presque racing green...
Il m'en reste quelques unes en calibre 20.
Dommage de tuer les dernières mouches en hiver, quand on sait qu'elles peuvent pondre des centaines d'oeufs et autant d'asticots, bien utiles quand la saison de la pêche redémarre aux derniers frimas.
Pour favoriser l'élevage, réserver une pièce bien chauffée dans la demeure, avec fenêtre entr'ouverte.
Y placer au centre un tonneau ouvert avec de la sciure de bois bien fine au fond.
Sur le dessus, on dépose sur une grille métallique un mélange de bifsteak haché, de viscères de poulet, de lapin ou de pintade, voire du placenta de vache si vous avez sous la main.
Les grosses mouches gourmandes ne tarderont pas.
Pour que les asticots soient plus gros, éteignez la lumière et rabattez les volets.
Au prix de vente des appâts et des asticots de pêche par les "verminières de l'ouest", la facture se rapprochant dangereusement des tarifs du caviar Béluga de chez Pétrochian...
Une start-up est envisageable.
J'ai pris la mouche.
L'ignoble Onkel.

Onkel pitsch a écrit:J'ai pris la mouche.

Tu as happé avec gourmandise, mon oncle.
J’ai toujours trouvé le caviar, qu’il provînt ou non de chez Petrossian, d’un convenu de classe relevant d’une mythique surfaite propre à enflammer les imaginations en rupture d’horizons et pour tout dire d’un goût douteux. De là à se gaver de canapés d’asticots en sirotant du champagne tiède dans une flûte en plastique en quelque succursale bancaire ou cabinet comptable lors du pot de fin d’année, il y a un pas que je ne saurais franchir.
On nous promet cependant des fricassées d’insectes riches en protéines comme nourriture de l’avenir ; alors adieu gigots, goulash et saucisses de Morteaux, le futur sera frugal.
Dans cette perspective, les Aymeric Caron au teint hâve moqués par Sherlock semblent avoir les alizés en poupe. Le véganisme n’est somme toute qu’un avatar plus ou moins bien digéré du bouddhisme, relayé par une babasphère qui reprend du poil de la bête en ces temps de disette spirituelle.
Ainsi, la probabilité d’écraser une réincarnation de son arrière arrière grand-mère avec une tapette à mouches ne peut qu’horrifier le néospirite en quête de communication avec le Grand Tout cosmique.
Si l’on pousse cette logique, manger de la laitue relèverait alors de l’homicide aggravé de cannibalisme, car qui peut m’affirmer que je ne verserais pas ma vinaigrette sur une résurgence chlorophyllée d’un lointain ancêtre ?
L’impossible n’est jamais certain, c’est bien là le problème.